Au moins – passez-moi l’expression – en voilà Un qui aura « mouillé la chemise » ! Jusqu’à en mourir piteusement au calvaire. La Sainte Tunique d’Argenteuil (Val d’Oise), c’est ce linge fin que le Christ, lors de sa Passion, porta à même la peau. Cette relique est maculée de son sang, imbibée de sa sueur, marquée par le portement de sa Croix. Elle accompagna le Sauveur tout au long de son chemin de souffrances, des cris de la foule au chevet de Son dernier cri. Car, comme le rappelle l’évangile de Jean, les soldats romains, sous le regard du supplicié suspendu, tirèrent au sort ce vêtement.
La Sainte Tunique d’Argenteuil, que le Christ portait en dessous, ne doit pas être confondue avec celle conservée à Trèves (Allemagne), qui serait celle du dessus. Le conditionnel s’impose ici en raison des sept couches de tissu qui font de cette seconde pièce « une relique de troisième classe, (…) ayant touché le vêtement original », indique l’historien de renom Jean-Christian Petitfils dans La Sainte Tunique d’Argenteuil (Tallandier, 2025). Polluée par des retouches et privée du contact direct avec le corps, la tunique de Trêves ne peut pas « parler », alors que l’Argenteuillaise peut livrer ses secrets. Les professeurs français André Marion, expert en traitement des images, et Gérard Lucotte, généticien, l’avaient auscultée en détail dans un ouvrage qui fera date (Le linceul de Turin et la tunique d'Argenteuil, Presses de la Renaissance, 2006).
C’est le même homme qui porta la Tunique et fut revêtu du Suaire. Même groupe sanguin (AB, très rare). Quand on superpose les deux reliques, on trouve des taches de sang aux mêmes endroits ! Ce point est capital pour attester de l’authenticité : le Christ eut l’horrible privilège de subir à la fois la flagellation et la crucifixion. Or, c’était soit l’un soit l’autre, comme le dit d’ailleurs Pilate dans l’évangile de Jean. Le gouverneur s’apprêtait à libérer le Christ après l’avoir fait flageller. Mais la chose tourna court devant le tumulte de la foule : il Le livra pour qu’Il le fût crucifié, tout en passant par la case flagellation. La Sainte Tunique d’Argenteuil « parle » d’un homme sanguinolant ayant porté sa croix et dans l’histoire, il n’y en a pas 36 !
Au calvaire, le Christ portait une paire de sandales, la Couronne d’épines, un caleçon et deux tuniques. Seules la Couronne et la Sainte Tunique sont toujours là, en France de surcroît (cocorico !). Les autres reliques, en l’espèce deux Suaires (Turin et Oviedo), « racontent » la séquence ayant suivi le supplice du Sauveur : le suaire d’Oviedo cacha le visage de Jésus à sa descente de Croix. Le Suaire de Turin enveloppa Son visage et tout Son corps dans le tombeau. Pour les scientifiques, tout indique qu’il s’agit du même personnage et foin du carbone 14 qui dit à peu près n’importe quoi, qu’il s’agisse de la Tunique ou du Suaire. Ce mode de datation ne convient pas à des pièces que les vicissitudes ont « réactivées » comme l’incendie de Chambéry pour le Suaire ou l’enfouissement de la Tunique sous la Terreur.
Dans une époque qui se targue d’être cartésienne et rationaliste, le christianisme peut attester de ce qu’il professe grâce aux pièces à conviction qu’il fournit. On est loin des fantaisies de la mythologie grecque ou de l’opacité entourant la vie de Mahomet. Entre nous, il n’y a plus qu’un Michel Onfray pour douter que Jésus ait existé. À sa manière, il est (t)unique !
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