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La Sainte Rencontre – Evangile: parabole de l’enfant prodigue – Pèlerin russe : le récit du garde (fin)

20.02.22
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La Sainte Rencontre – Evangile: parabole de l’enfant prodigue – Pèlerin russe : le récit...

Lumière de l'Orthodoxie 00h03

CHANTS

« Meteora Sacra » par les Maîtres de l’Art Psalmique –  Holy Monastery of Great Meteoron – 1992

INTRODUCTION  de Cécile Loupan

 La Sainte Rencontre

Selon le calendrier julien, mardi dernier, nous avons fêté la Sainte Rencontre, c’est-à-dire la Présentation du Seigneur. Imaginons la scène. Deux parents pauvres apportent leur bébé. Deux vieillards les accueillent. Rien d’extraordinaire ni d’impressionnant. Nous serions sans doute passés sans même les remarquer. Et pourtant il s’agit là de la réalisation solennelle de l’ancienne et prodigieuse prophétie. Siméon et Anne qui accueillent l’Enfant sont les témoins de l’antique Israël, tous deux attendent ardemment la rédemption du monde promise par Dieu. « La gloire à venir de ce Temple dépassera celle de l’ancien » avait annoncé le prophète Aggée. La voilà, cette gloire : un petit enfant avec ses parents, deux vieillards et une assemblée ordinaire peu attentive. « La venue du Royaume de Dieu ne se laisse pas observer » dit Jésus dans St Luc.

Telle a toujours été la manière de Dieu dans ses visites. Que ce soit à Adam et Eve au Paradis terrestre, à Elie dans sa grotte, à Marie, à Siméon et Anne : le silence, la soudaineté, la surprise pour le monde, malgré les prédictions connues de tous. Il ne peut en être autrement. Les avertissements de Dieu sont clairs, mais le monde continue sa course ; engagés dans leurs activités, les hommes ne savent pas discerner le sens de l’histoire. Ils prennent de grands événements pour des faits sans importance. Le monde reste aveugle, mais la Providence cachée de Dieu se réalise jour après jour. Demandons à St Siméon et à la sainte prophétesse Anne de nous aider à voir la Lumière du Saint-Esprit dans nos vies.

EVANGILE ET HOMELIE par le père Marc-Antoine Costa de Beauregard

Parabole de l’enfant prodigue (Luc 15, 11-32)

En ce temps-là, Jésus dit la parabole suivante. Un père avait deux fils et le plus jeune lui dit : « Père, donne-moi la part qui me revient de notre fortune. » Et le père partagea les ressources entre eux. Peu de jours après, le plus jeune fils, ayant tout rassemblé, partit pour un pays lointain et, là, il dissipa sa fortune, menant une vie de perdition. Lorsqu’il eut tout dépensé, une cruelle famine toucha ce pays et il commença à être dans le dénuement. Il alla donc s’engager auprès d’un des habitants de ce pays qui l’envoya garder les porcs dans ses champs. Il aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubes que mangeaient les porcs, et personne ne lui en donnait. Entrant en lui-même, il dit : « Tant de salariés de mon père ont du pain en abondance et moi, ici, je meurs de faim ! Je vais me lever, j’irai vers mon père et je lui dirai : ‘ Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme un de tes salariés.’ » Il se leva et alla vers son père. Comme il était encore loin, son père le vit et fut saisi de miséricorde ; il courut se jeter au cou de son fils et l’embrassa tendrement. Le fils lui dit : « Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. » Mais le père dit à ses esclaves : « Vite, apportez le vêtement le plus beau, et revêtez-l’en ; mettez-lui un anneau à la main et des chaussures aux pieds ! Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et réjouissons-nous ! Mon fils que voici était mort, et il est vivant ; il était perdu et il est retrouvé !» Et ils se mirent à se réjouir. Son fils aîné était aux champs : comme il approchait de la maison, il entendit jouer des danses ; il appela un des serviteurs et lui demanda ce qui se passait. Celui-ci lui dit : « Ton frère est là, et ton père a tué le veau gras parce qu’il l’a recouvré en bonne santé. » Le fils aîné se mit en colère et ne voulait pas entrer. Mais, son père sortit pour l’en prier. Il répondit à son père : « Voilà tant d’années que je te sers comme un esclave sans jamais transgresser un seul de tes commandements, et tu ne m’as jamais donné un chevreau pour me réjouir avec mes amis ; et quand ton fils que voilà revient, après avoir dévoré tes ressources avec des débauchées, tu tues pour lui le veau gras ! » Son père lui dit : « Mon enfant, tu es toujours avec moi et tout ce qui est à moi est à toi, mais il fallait se réjouir et rendre grâce, car ton frère que voici était mort et il est vivant ; il était perdu et il est retrouvé ! »

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Homélie : Après l’histoire du pharisien et du publicain, nous entendons encore aujourd’hui une histoire juive : « un père avait deux fils et le plus jeune lui dit… » Ainsi en Israël enseigne-t-on. Jésus Christ, c’est-à-dire messie, enseigne en rabbin, en maître juif. Il utilise le langage de la parabole pour toucher la conscience en amont de la compréhension au premier degré. Notre Dieu est un enseignant et un pédagogue, et Il a un message fondamental à faire passer, celui qu’Il exprimera finalement, non plus par un conte, mais par un acte extraordinaire, quand Il voulut offrir librement sa vie sur la Croix pour le Salut de son peuple et, au-delà de celui-ci, de l’humanité tout entière. Le message court dans toutes les pages de l’Évangile, cet accomplissement de la Bible entière. Au lieu de dire « Je suis bon », Dieu montre qu’Il est bon. Dimanche dernier, Il nous faisait comprendre que la miséricorde est ce qui lui appartient le plus. Aujourd’hui, Il nous délivre le même message, en le précisant comme paternité. Certes, nos ancêtres juifs donnaient déjà à Dieu le nom de Père. Mais le Fils, Celui en qui le Père, sur les bords du Jourdain, a dit qu’Il se reconnaît, vient dans le monde pour faire connaître le Père, « mon père et votre père », comme Il le dit (Jn 20, 17). La figure du père dans l’évangile de ce jour révèle la bonté foncière de notre Dieu : « le père partage ses ressources entre » les hommes ses fils, qu’ils soient des pécheurs comme le cadet ou des justes, comme l’aîné. Quand l’homme s’éloigne de lui, Il ne lui dit rien, Il guette son retour, et l’accueille sans lui demander de comptes. Bien plus, Il se réjouit avec toute sa maison ! Il invite son pharisien d’aîné à se réjouir avec lui. Le Carême est le temps où l’Esprit saint nous initie à la miséricorde du Père. Nous n’avons rien d’autre à attendre : que nous soyons débauchés ou que nous n’ayons « jamais transgressé un seul de ses commandements », le Père nous aime autant. Ou plutôt : Il aime l’un et l’autre, non pas également, mais de façon unique, sans faire de comparaison. La miséricorde ne calcule pas. Elle est totale et sans mesure. Dans l’épître de ce jour nous entendons « j’ai toute liberté », parce que la miséricorde est un infini et divin respect de la liberté humaine.

SAGESSE DES PERES par Cécile Loupan

Pèlerin russe : le récit du garde (fin)

Le Pèlerin russe a rencontré dans la forêt déserte, un garde forestier qui lui a proposé de rester dans la cabane de l’ancien garde pour les quatre mois d’été. Et il a commencé à raconter son ancienne vie de teinturier querelleur, buveur et grossier. Jusqu’au jour où un vieux chantre qui avait un livre sur le Jugement dernier, lui a lu la description du Jugement et de l’enfer pour les damnés. Ce qui l’a terrorisé. Voici la suite, écoutez bien :

« ‘‘Soudain, continue le garde, j’ai eu une peur effrayante et je me suis dit : Je n’échapperai pas aux tourments ! Holà, je vais me mettre à sauver mon âme et j’arriverai peut-être à racheter mes péchés. Je réfléchis longuement et je décide d’abandonner mon métier. Comme je vis seul, je vends ma maison, je me fais garde forestier, ne demandant pour salaire que du pain et de l’eau, de quoi me vêtir et des cierges pour allumer pendant les prières. Et voilà plus de dix ans que je vis ici. Je ne mange qu’une fois par jour et ne prends que du pain et de l’eau. Chaque nuit, je me lève au premier chant du coq et jusqu’au jour je fais les métanies petites et grandes (c’est-à-dire les inclinaisons et les prosternations). Lorsque je prie, j’allume sept cierges devant les icônes. Le jour, quand je parcours la forêt, je porte des chaînes de trente kilos sur la peau. Je ne jure pas. Je ne bois ni bière ni alcool. Je ne me querelle avec personne. Quant aux femmes et aux filles, je n’en ai jamais connu. Au début, j’étais plutôt content de vivre ainsi. Mais, à force, je suis assailli de réflexions que je ne peux pas chasser. Dieu sait si je rachèterai mes péchés ! Mais cette vie est bien dure… Et puis… est-ce vrai ce que racontait ce livre ? Comment l’homme peut-il ressusciter ? Ceux qui sont morts depuis cent ans et plus, leur poussière même a disparu ! Et qui sait, y aura-t-il vraiment un enfer ou non ? En tout cas, personne n’est jamais revenu de l’autre monde. Quand l’homme meurt, il pourrit et il n’en reste plus aucune trace. Ce livre, c’est peut-être les popes ou les fonctionnaires qui l’ont écrit pour nous effrayer, nous les imbéciles, pour que nous soyons plus soumis. Alors, on vit péniblement, sans consolation sur cette terre, et dans l’autre monde, il n’y aura rien ! A quoi bon ? Ne vaut-il pas mieux avoir un peu de bon temps ici, tout de suite ? Ces idées me poursuivent, et j’ai peur d’avoir à reprendre mon ancien métier, très bientôt…’’ Je suis plein de pitié pour lui, raconte le Pèlerin russe. Et je me dis : on prétend que seuls les savants et les intellectuels deviennent libres-penseurs et ne croient plus à rien, mais nos frères, les simples paysans, quelle incroyance ils se fabriquent ! Sûrement le monde obscur nous entoure tous et peut-être qu’il s’attaque encore plus facilement aux simples. Ah oui, il faut raisonner autant que possible et se fortifier contre l’ennemi par la Parole de Dieu. Aussi, pour soutenir un peu ce frère et raffermir sa foi, je sors de mon sac la Philocalie et je l’ouvre au chapitre 109 du bienheureux Hésychius. Je le lui lis et lui explique qu’on ne se retient pas de pécher par la seule crainte du châtiment.  Ce n’est que par la vigilance de l’esprit et la crainte du cœur que l’âme peut s’affranchir des pensées coupables. »

Nous verrons, la fois prochaine, comment le Pèlerin russe va guider le garde.

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