En Quête de Sens : « Pour bien diriger, il faut de l’intuition et de l’écoute », François Bert
Que ce soit sur le plan politique, économique, scolaire, familial… Dans de nombreux domaines, difficile d’échapper aujourd’hui une faillite des mécanismes d’autorité formelle. Notre démocratie souffre-t-elle de ce manque d’autorité ? C’est la question abordée par Marie-Ange de Montesquieu dans « En Quête de Sens ». « Le général de Gaulle savait gérer les crises, c’est certain, il émanait de…
Que ce soit sur le plan politique, économique, scolaire, familial… Dans de nombreux domaines, difficile d’échapper aujourd’hui une faillite des mécanismes d’autorité formelle. Notre démocratie souffre-t-elle de ce manque d’autorité ? C’est la question abordée par Marie-Ange de Montesquieu dans « En Quête de Sens ».
« Le général de Gaulle savait gérer les crises, c’est certain, il émanait de lui une autorité naturelle », explique Arnaud Teyssier, « mais il ne faut pas l’imaginer en tant que tel , il est important de savoir qu’il a laissé des institutions faites pour avoir de l’autorité lorsqu’il ne serait plus là, c’était son obsession ». Ainsi, le général de Gaulle a veillé à mettre en place l’élection du président de la République au suffrage universel : un exécutif fort avec une administration forte. Mais qu’est-ce qui fait donc qu’un chef est un bon chef ? Pour François Bert, la réponse est claire : « le mot-clé c’est le discernement, c’est ce qui fait le chef, la capacité à prendre la mesure sur les sujets en cours, pour sans cesse redonner l’effort à faire sur les points les plus importants ». De ce point de vue, François Bert se dit d’ailleurs partisan de la présentation d’un binôme aux Présidentielles à la place d’un homme seul. « On est aujourd’hui en permanence en train de vendre un portrait parfait au détriment d’une réalité qui s’effrite », ajoute-t-il.
« On a aujourd’hui un problème de casting, on n’a pas les chefs qui correspondent au peuple », François Bert
Pour Caroline Ruellan, il est nécessaire de remettre en perspective le « contexte macro-historique ». « On vit une véritable rupture civilisationnelle d’un point de vue économique, sanitaire, sociale, énergétique et politique », souligne-t-elle, « la conséquence première, c’est une faillite des mécanismes d’autorité formelle ». Avec « le passage d’une autorité verticale à une autorité horizontale, le chef doit se repositionner et se réinventer, car il ne sait pas trop comment être chef aujourd’hui ». Arnaud Teyssier, de son côté, le rappelle : « à la fin des fins, l’autorité doit être verticale, il y a de codes à maitriser et peut-être réapprendre ».
« Ce qui caractérise fondamentalement le chef, c’est celui qui doit opérer ce passage très difficile du doute à la décision, du contemplatif à l’action », Caroline Ruellan
« On nous laisse penser dans nos sociétés contemporaines que plus on a d’expertises autour de nous, plus notre décision sera éclairée, c’est un grand piège contemporain », explique Caroline Ruellan qui regrette : « la boussole n’est pas la surenchère d’expertises ». Au contraire, insiste-t-elle, « la décision suppose un moment d’isolement, de silence, de recueillement, alors que nous sommes dans une société très, trop bruyante, et que les experts ajoutent à ce bruit ». Il est clair que nous sommes donc désormais « en recherche d’une nouvelle boussole », et que cela passe par la « nécessité de remettre de la temporalité et de réinjecter du sens ». Le problème pour Caroline Ruellan, c’est qu’il est devenu difficile de « déterminer un socle commun » car il y a aujourd’hui « surenchère identitaire et surenchère de revendications ». « On sent bien que l’on cherche, que l’on est en balbutiements », conclut-elle.
« Les chefs confondent aujourd’hui les grandeurs naturelles et les grandeurs d’établissement », Arnaud Teyssier
Arnaud Teyssier quant à lui, aime le rappeler : « un homme d’Etat incarne d’abord une grandeur d’établissement », il faut toujours garder « une forme de distance à l’individu ordinaire ». Et d’alerter : « la volonté d’être aimé détruit l’autorité, c’est la grande tentation des hommes politiques depuis un certains nombres d’années ».
Les invités de Marie-Ange de Montesquieu :
Arnaud Teyssier, haut fonctionnaire et historien, il est l’auteur de « « L’énigme Pompidou-De Gaulle » (Perrin)
François Bert, Saint-Cyrien, officier parachutiste à la Légion étrangère puis gérant de portefeuilles et manager commercial, François Bert élabore une méthode unique de diagnostic des personnalités. Fondateur en 2011 d’Edelweiss RH, il conseille « en situation » les équipes de direction, en accompagnant les dirigeants au discernement situationnel. En 2019, il fonde L’École du discernement. Auteur en 2016 de l’essai « Le temps des chefs est venu » il publie en 2018 un roman de management sur la Grande Guerre, « Cote 418« (Edelweiss Éditions)
Caroline Ruellan, Présidente et fondatrice de SONJ Conseil, Docteur en Droit privé, diplômée du Harward Law School, cadre au sein du groupe AIG (assurance du risque financier), Présidente de l’Association Cercle des Administrateurs, membre notamment du conseil de surveillance de Ardian France et de la Commission Consultative Epargnants de l’AMF, spécialiste en gouvernance et stratégie. Auteur de « Droit Commercial – Notions générales » (2017)